Pas de renouvellement du bail pour défaut d’immatriculation du locataire pour l’activité exercée dans le local commercial
Le locataire immatriculé au registre du commerce et des sociétés pour une activité qui ne correspond plus à celle réellement exercée ne peut pas se prévaloir du statut des baux commerciaux pour demander le paiement d’une indemnité d’éviction et perd ainsi tout la protection de sa propriété commerciale prévu par le décret de 1953.
Le défaut d’immatriculation du locataire au registre du commerce et des sociétés pour l’activité exercée dans les lieux loués au jour de la délivrance du congé le prive de son droit à renouvellement et au paiement d’une indemnité d’éviction (Cass. 3e civ. 1-10-2003 n° 02-10.381 FS-PB : RJDA 1/04 n° 20).
Le propriétaire de locaux commerciaux loués à usage de vente d’objets d’art et de luxe avait refusé la demande de renouvellement notifiée par son locataire et lui avait proposé une indemnité d’éviction. Quelques semaines plus tard, il avait demandé la résiliation du bail et la déchéance du droit à indemnité, reprochant au locataire qui vendait désormais des objets touristiques d’avoir changé d’activité sans modifier son immatriculation au registre du commerce.
Une cour d’appel avait rejeté cette demande, après avoir retenu que le locataire était immatriculé à la date de la demande de renouvellement du bail, que l’absence de modification de l’immatriculation ne constituait pas un manquement suffisamment grave pour justifier la déchéance du droit au paiement de l’indemnité d’éviction, faute pour le bailleur d’avoir mis en demeure son locataire de régulariser la situation et que la loi ne prévoit expressément que l’obligation d’immatriculation.
La Cour de cassation a censuré ce raisonnement : la dénégation du droit au statut des baux commerciaux en raison du défaut d’immatriculation d’une société au titre de l’activité réellement exercée n’a pas à être précédée d’une mise en demeure.
A noter : Le statut des baux commerciaux s’applique aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit au chef d’une entreprise immatriculée au répertoire des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce (C. com. art. L 145-1, I). L’immatriculation du locataire est en conséquence une condition nécessaire pour bénéficier du statut des baux commerciaux (Cass. 3e civ. 30-1-2002 n° 00-15.393 FS-D : RJDA 4/02 n° 360). Lacondition liée à l’immatriculation du locataire s’apprécie à la date du congé, mais le propriétaire peut s’en prévaloir même après la délivrance de ce congé pour rétracter une offre de paiement d’une indemnité d’éviction (Cass. 3e civ. 9-3-2011 n° 10-10.973 FS-D : RJDA 11/11 n° 888). Il peut en outre s’en prévaloir même s’il connaissait le défaut d’immatriculation à la date du congé (Cass. 3e civ. 19-11-2015 n° 14-22.000 F-D : RJDA 3/16 n° 175).
Toute personne soumise à immatriculation doit déclarer, « en ce qui concerne son activité et son établissement », la ou les activités exercées (C. com. art. R 123-38). L’immatriculation conditionnant le bénéfice du statut doit être complète. La Cour de cassation en déduit que cette immatriculation doit viser l’activité effectivement exercée dans les locaux loués.
Elle rappelle par ailleurs que, s’agissant d’une dénégation du droit au statut des baux commerciaux, et non pas d’un refus de renouvellement pour motif grave et légitime, le propriétaire n’a pas à faire précéder sa notification d’une mise en demeure préalable (Cass. 3e civ. 17-3-2009 n° 08-15.692 F-D).
Maya VANDEVELDE
Cass 3e civ. 22-9-2016 n°15-18.456 F-PB
SOURCES : Editions Francis Lefebvre – La Quotidienne