Les dividendes ne sont pas dus aux associés tant que la décision de les distribuer n’est pas prise
En l’absence de décision de distribution de dividendes, la société n’en est pas débitrice envers les associés. Elle n’a donc pas à payer le créancier d’un associé pratiquant une saisie-attribution entre ses mains pour manquement à son obligation de renseignement.
Les dividendes n’ont pas d’existence juridique avant la constatation de sommes distribuables par l’organe social compétent et la détermination de la part de bénéfices attribuée à chaque associé (jurisprudence constante ; en dernier lieu, Cass. com. 4-2-2014 n° 12-23.894 F-D : RJDA 5/14 n° 433).
Ayant rappelé ce principe, La Cour de cassation en déduit, dans un arrêt promis à une large publication, qu’en l’absence d’une décision de distribution, une société civile immobilière (SCI) ne pouvait pas être reconnue débitrice de dividendes à l’égard de ses associés.
En l’espèce, le Trésor public, créancier d’un associé de la SCI, avait fait pratiquer dans les mains de celle-ci une saisie-attribution des dividendes qu’il estimait dus à l’associé. La société n’ayant pas fourni à l’huissier les renseignements nécessaires à la mise en œuvre de la saisie, le Trésor public avait demandé qu’elle soit condamnée à lui payer la somme due par l’associé (application de l’article R 211-5 du Code des procédures civiles d’exécution).
Cette demande devait être rejetée puisque la SCI n’était redevable d’aucune somme à l’égard de l’associé. C’est donc à tort qu’une cour d’appel l’avait accueillie en écartant l’argument de la société selon lequel l’absence de preuve de sa qualité de débitrice résultait de l’affectation des revenus fonciers à son compte de bilan « report à nouveau » et en retenant que la créance de dividende résultait de la déclaration fiscale de revenus fonciers de l’associé.
A noter : dans les sociétés de personnes (pour l’essentiel, société en nom collectif et, comme en l’espèce, sociétés civiles), les bénéfices sont imposables au nom de chaque associé à hauteur de ses droits dans la société indépendamment de toute décision de distribution et même s’ils ne sont pas distribués (CGI art. 8). Cette règle fiscale est sans incidence sur la naissance de la dette de dividende de la société à l’égard des associés. Celle-ci ne peut donc pas être condamnée à payer aux associés leur part dans les bénéfices au motif que ces derniers sont imposables au nom des associés dès qu’ils sont réalisés (Cass. com. 14-12-2010 n° 09-72.267 F-D : RJDA 2/11 n° 147).
La société n’étant pas débitrice à l’égard des associés, elle ne peut pas non plus être condamnée à payer à un créancier de l’un d’eux pratiquant entre ses mains une saisie-attribution les sommes dues au créancier pour non-respect de l’obligation de renseignement prévue à l’article R 211-5 du Code des procédures civiles d’exécution (Cass. 2e civ. 23-11-2006 n° 1934 FS-D : RJDA 4/07 n° 357). Il n’en va autrement que si, au jour de la saisie, les dividendes ont été mis en distribution (Cass. com. 8-6-2017 n° 15-19.125 F-D : RJDA 10/17 n° 659, rendu en matière d’avis à tiers détenteur).