La réforme de la formation professionnelle avance..
La ministre du travail, Muriel Pénicaud, a présenté les grandes lignes de sa réforme de la formation professionnelle quelques jours seulement après la conclusion par les partenaires sociaux d’un accord national interprofessionnel sur le sujet…
Les étapes de la réforme
Lancée à l’automne dernier par le Gouvernement, la réforme de la formation professionnelle a franchi deux nouvelles étapes.
Tout d’abord, les partenaires sociaux ont conclu le 22 février un accord national interprofessionnel (ANI) pour l’accompagnement des évolutions professionnelles, l’investissement dans les compétences et le développement de l’alternance ; cet accord a été signé par toutes les organisations patronales et syndicales, sauf la CGT.
C’est ensuite la ministre du travail, Muriel Pénicaud, qui a présenté le 5 mars les principes directeurs de sa réforme visant à transformer en profondeur le système de la formation professionnelle en France.
À noter : l’étape suivante de la réforme passe par la présentation en Conseil des ministres, vraisemblablement dans le courant du mois d’avril, d’un projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » qui intégrera, outre la réforme de la formation professionnelle, deux autres grands volets consacrés à l’apprentissage et à l’assurance chômage.
S’éloignant quelque peu des préconisations inscrites dans le document d’orientation qui leur avait été remis par le Gouvernement il y a quelques mois, les partenaires sociaux ont annoncé plusieurs mesures emblématiques, notamment sur le compte personnel de formation (CPF) et le financement de la formation. De son côté, la ministre du travail, déçue par le contenu de l’ANI, est allée bien plus loin, notamment en matière de gouvernance nationale de la formation.
Le contenu de l’ANI
Les principales mesures de l’ANI sont les suivantes :
– le compte personnel de formation serait renforcé ; toujours crédité en heures, son alimentation passerait ainsi à 35 heures par an dans la limite de 500 heures (au lieu de 24 heures puis 12 heures par an jusqu’à l’acquisition d’un crédit de 150 heures) ; en outre, les heures inscrites sur le CPF pourraient être abondées notamment dans le cadre d’un co-investissement défini et construit avec l’entreprise ou d’un accord de branche ; par ailleurs, le système des listes paritaires de formations éligibles au CPF serait supprimé et seules les certifications inscrites au RNCP (répertoire national de la certification professionnelle, en cours de refonte) et les formations permettant d’obtenir des blocs de compétences correspondant seraient éligibles ; enfin, un CPF « transition professionnelle » serait instauré et intégrerait une partie des droits liés au congé individuel de formation, qui pourrait être supprimé ;
– le plan de formation serait refondu et deviendrait le plan d’adaptation et de développement des compétences ; lors de son établissement, toujours soumis à la consultation des représentants du personnel, l’employeur n’aurait plus à faire la distinction entre les actions d’adaptation au poste de travail et de maintien dans l’emploi et celles de développement des compétences ; l’action de formation serait en outre redéfinie comme le processus pédagogique d’apprentissage par lequel tous les moyens (sous quelque forme que ce soit) sont déployés au regard de la situation de la personne pour lui permettre d’adapter, d’acquérir ou de développer des compétences professionnelles ou d’obtenir une qualification ;
– la formation en alternance reposerait toujours sur la distinction entre les contrats de professionnalisation et d’apprentissage qui serait conservée ; toutefois, une gouvernance unique par les branches professionnelles et des modalités communes (modèle, procédure, régime de rupture) seraient mises en œuvre ; par ailleurs, l’alternance serait financée par une seule et même contribution prélevée sur la contribution unique consacrée à la formation professionnelle ;
– la formation professionnelle dans sa globalité serait financée par une contribution unique et obligatoire, dont le montant serait égal à 1,23 % de la masse salariale pour les entreprises de moins de 11 salariés et de 1,68 % pour celles atteignant ou dépassant cet effectif ; parallèlement, la taxe d’apprentissage serait supprimée ; en pratique, le niveau de prélèvement des entreprises en matière de formation serait donc inchangé ;
– la prestation du conseil en évolution professionnelle serait consolidée afin de mieux accompagner les salariés dans la construction de leur parcours professionnel et bénéficierait d’un financement dédié à hauteur de 2,75 % de la contribution unique.
Le projet de la ministre du travail
Dans son discours, la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a présenté les grandes lignes de son projet :
– le compte personnel de formation serait alimenté en euros (et non plus en heures de formation) à hauteur de 500 € par an dans la limite d’un plafond de 5 000 € au bout de 10 ans pour un salarié à temps plein ; ce crédit serait majoré pour les salariés peu qualifiés (800 € par an dans la limite de 8 000 €) ; le compte d’un travailleur en contrat à durée déterminée serait proratisé, mais pas celui du salarié à temps partiel (mi-temps ou plus) qui aurait un crédit identique à celui accordé à un salarié à temps plein ; par ailleurs, comme l’ANI, le projet gouvernemental prévoit la création d’un CPF de transition pour les formations longues ;
– le plan de formation de l’entreprise serait simplifié conformément aux souhaits des partenaires sociaux présentés ci-dessus ;
– l’employeur ne paierait plus qu’une seule contribution pour la formation continue et l’alternance comme le prévoient également les organisations syndicales et patronales dans leur accord (voir ci-dessus) ; mais le rôle de collecte de cette nouvelle cotisation relèverait de l’Urssaf et non plus des organismes collecteurs paritaires agrées ; ces derniers deviendraient alors des opérateurs de compétences chargés d’assister les entreprises et les branches professionnelles à anticiper la transformation des métiers, bâtir une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et construire leur plan de formation ;
– la gouvernance nationale paritaire de la formation serait profondément réformée ; en pratique, les multiples instances actuelles, à savoir le FPSPP, le Cnefop et le Copanef, seraient regroupées en une agence nationale unique, dénommée France Compétences, qui serait chargée de réguler le prix et la qualité des formations et d’assurer la péréquation interprofessionnelle en matière d’alternance et de formation des petites et moyennes entreprises.